Éducation des enfants après un divorce : Calvaire et misères des mères célibataires
Etre mère célibataire peut parfois être compliqué à vivre. Car, au fur et à mesure que les enfants grandissent et atteignent l’adolescence, les soucis et inquiétudes se multiplient. Si certaines peuvent gérer les crises de leur progéniture, d’autres y arrivent difficilement.
Awa Ndoye, 36 ans, est mère de cinq enfants. Elle est divorcée depuis sept ans et depuis lors, elle a la garde de ses enfants avec qui elle partage la même chambre.
Awa est femme de ménage et commerçante. Avec ses deux métiers, elle arrive tant bien que mal à s’occuper de ses enfants. « Depuis mon divorce, mon ex-mari a complètement tourné le dos à la progéniture. Il ne se soucie pas des enfants. C’est moi qui les nourrit et les soigne quand ils sont malades », confie la mère de famille.
Awa est depuis quelque temps confrontée à un un sérieux problème. Son fils lui en fait voir des vertes et des pas mûres. «Mon fils aîné a 17 ans. Il était à l’internat et a refusé d’y retourner quand il était venu passer la Korité en famille. Depuis lors, il est méconnaissable. Il s’en prend à ses sœurs en les frappant, il se bat et maintenant il ose même amener des filles dans ma propre chambre », se désole Awa qui se sent impuissante face à cette situation.
«J’ai même pensé à aller voir la police pour qu’on le corrige. Il y a quelques jours, quand j’ai reçu ma paie sur mon téléphone, il est allé retirer l’argent et a effacé toute traçabilité de la transaction », raconte la trentenaire qui pense avoir échoué en tant que mère. Elle en veut aussi énormément à son ex mari et à sa famille qui ne se soucient pas d’elle. «Les enfants auraient pu être bien éduqués si leur père gardait un œil sur eux. Depuis qu’il a construit une nouvelle famille, c’est comme s’il n’avait jamais été père. Je vis avec mes frères mais ils se comportent comme si j’étais leur colocataire. Je me sens seule », raconte-t-elle avec beaucoup d’amertume.
La jeune mère vit constamment dans la peur que son fils emprunte le chemin de la délinquance. «Mon fils est violent envers tout le monde et le fait qu’il commence à voler m’empêche de dormir car je sais que si je n’ai pas de l’aide, il va sombrer », confesse Awa.
Le cas de Absa Faye est tout aussi délicat. Son fils âgé maintenant de 21 ans ne lui adresse pas la parole depuis 5 ans. En effet, le jeune homme qui était âgé de 16 ans commençait à lui manquer de respect, à voler et à se droguer. Incapable de trouver seule une solution, elle est partie à la police pour porter plainte. « Il a été convoqué et les policiers lui ont fait peur. Même si depuis lors il a arrêté, nos relations se sont détériorées. Mon fils, qui avant était mon complice, est devenu froid et on vit comme des locataires », regrette-t-elle.
Absa fait tout pour retrouver la complicité qu’elle avait avec son aîné, mais ce dernier ne lui facilite pas la tâche. « Il quitte la maison très tôt et rentre tard. Parfois même, il passe la nuit dehors », confie la maman affligée.
«il est possible que l’absence d’un père dans le processus de maturation du jeune soit la cause de sa révolte contre ses proches »
Selon le psychologue Khalifa Diagne, les jeunes peuvent avoir un comportement inconcevable à l’endroit de leurs proches, en l’absence d’un père, pour différentes raisons. C’est pourquoi chaque cas doit être étudié individuellement.
“Toutefois, si l’on doit parler dans un cadre général, il faut comprendre que dans ce que nous considérons comme jeunesse chez nous, il y a la période d’adolescence qui est une période de révolte. C’est une période de crise parce que la personne vit une transition entre l’enfance et l’adulte”, analyse-t-il.
“Par conséquent, poursuit-il, il est bien possible que l’absence d’un père dans le processus de maturation du jeune soit effectivement la cause de sa révolte contre ses proches. Il peut en vouloir à sa mère et s’en prendre particulièrement à elle en la prenant comme un bouc-émissaire ou la coupable qui lui a privé d’un père. Pire, si le jeune pense ou découvre que son entourage, sa mère en premier, lui ment à propos de son père, c’est un facteur aggravant de sa mutinerie. Ce sont des cas qu’on rencontre malheureusement et régulièrement dans notre société puisqu’en l’absence d’un père pour diverses raisons (refus de reconnaissance, abandon, désaveu de paternité, ect.), certaines familles ont tendance à vouloir trouver des éléments de langage enveloppés par un tissu de mensonges pour étouffer le questionnement du jeune.”
L’absence d’une figure paternelle rend vulnérable la mère
Toujours selon le psychologue, dans une famille normale il faut un père et une mère. L’absence de l’une ou de l’autre complique toujours l’éducation en général et du jeune en particulier. “Dans une société comme la nôtre où l’autorité parentale est détenue par le père, vous comprenez aisément que son absence fragilise et rend vulnérable la mère en ce sens que le jeune cède plus facilement aux tentations de défiance”, observe-t-il.
Quelqu’un pour jouer le rôle de père ?
Selon Khalifa Diagne, les solutions doivent être adaptées à chaque cas. D’abord, estime-t-il, sur les raisons de l’absence du père, il faut trouver les éléments de langage adéquat pour en parler à l’enfant puisque cela ne peut pas manquer de faire l’objet de questionnement de sa part. « Même s’il garde le silence, il se questionne à ce propos. Ensuite, il s’agira, si possible, de trouver une personne de confiance qui pourrait jouer le rôle de père à côté de la mère », explique M. Diagne.