[À Rebrousse-Poil] Malaise Dans La Presse (Par Adama Ndiaye)
Pape Alé Niang, Pape Ndiaye, Serigne Saliou Gueye, Babacar Touré, Maty Sarr Niang. Voici quelques noms de journalistes qui ont eu maille à partir avec la justice ces derniers temps dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions. Ces arrestations sonnent comme un recul de la liberté d’expression et de la presse au Sénégal. Ce que confirme d’ailleurs le dernier baromètre de Reporters Sans Frontières. Le Sénégal figure parmi les pays qui reculent le plus au classement annuel de la liberté de la presse (104e, -31 places).
Cette situation ne semble pas émouvoir outre mesure les organisations de presse. Si la “solidarité corporatiste” a été au rendez-vous lors de l’affaire incriminant M. Niang, patron de Dakarmatin, elle s’est progressivement étiolée lors des affaires suivantes. Le silence est devenu assourdissant. Pourquoi ce silence, d’ailleurs ?
Il me semble que dans le milieu beaucoup sont gênés par les postures de certaines des personnalités citées un peu haut. Disons-le, par leurs analyses, leurs déclarations, leurs styles, ces personnalités ont fait le choix d’être des compagnons de route de l’opposition et ressemblent beaucoup plus à des activistes que l’image que l’on a habituellement des journalistes. Ils ont fait le choix d’un parti pris flagrant pour M. Sonko jusqu’à une certaine forme de connivence et de complaisance, tout en se drapant sous le manteau de l’indépendance. Mais cela constitue-t-il un crime ?
Même si les styles différent, on aurait pu faire les mêmes reproches à Messieurs Latif Coulibaly, Alioune Fall, Souleymane Jules Diop, El Hadj Kassé et tant d’autres qui, dans les années 2010-2012, ont activement contribué à la chute de Abdoulaye Wade. Eux tous aujourd’hui gravitent dans les cercles du pouvoir de Macky Sall.
« Ne versez pas dans la ‘partisanerie’, travaillez pour le public! », a conseillé M. Bamba Kassé, Secrétaire général du syndicat national des professionnels de l’information et de la communication (SYNPICS), lors du gala des jeunes reporters, samedi dernier, visiblement conscient du malaise qui règne dans la profession.
C’est un idéal vers lequel tous les journalistes doivent tendre. Et même si nous avons des orientations politiques, ou des sensibilités personnelles, ce qui est naturel pour tout être doué de raison, il y a deux choses dont nous ne devons jamais nous départir : l’honnêteté intellectuelle et le respect de la sacralité des faits.
Mais il est tout aussi impératif de se battre pour nos libertés quelles que soient nos divergences personnelles. Il ne faut rien céder aux intimidations politiques d’où qu’elles viennent. Et par-dessus tout nous devons dire non à cette tendance d’enfermer les journalistes pour des délits de presse.