Hausse des prix de l’énergie : Les pauvres vont payer la note
Le gouvernement du Sénégal, sous la pression du Fonds monétaire international, avait promis d’augmenter les prix du carburant et de l’électricité, sans que cela n’impacte les moins nantis. « Les plus forts doivent aider les plus faibles », déclarait la ministre du pétrole et des énergies, Sophie Gladima.
Son collègue Abdou Karim Fofana affirmait que 52% des véhicules à Dakar étaient de type 4X4. Ce qui veut dire que les propriétaires ont les moyens de se payer de l’essence, sans l’aide de l’Etat. « Ceux qui ont une petite consommation ou des revenus moyens ou assez modestes seront toujours subventionnés », assurait-il.
Mais on savait déjà que c’était une manière de mettre son doigt dans l’œil du plus faible, tout en jurant que ça ne fait pas mal, ce dernier étant obligé de supporter parce que n’ayant pas le choix.
D’ailleurs, la réalité du terrain n’a pas mis du temps à rattraper le gouvernement. A peine les prix du carburant augmentés que l’Association pour le financement du transport urbain (Aftu), le regroupement le plus puissant dans ce secteur, annonce le réajustement des tarifs à partir de ce lundi. Le ministre des transports semble surpris.
Mansour Faye sort rapidement un communiqué pour réfuter toute hausse. « Aucune augmentation des tarifs de transport n’a été discutée, encore moins arrêtée, avec les opérateurs ». Ce dernier met en garde contre toute hausse unilatérale, tout en privilégiant le dialogue et des mesures palliatives. « Des concertations sont en cours pour subventionner directement les opérateurs, afin que le réajustement des prix du carburant n’ait pas d’impact sur la tarification du transport routier ».
Que faire avec les Rapides, Ndiaga Ndiaye, clandos… ?
Le Sénégalais démuni pourra garder espoir, même s’ il y a de quoi être sceptique. En effet, avant cette, il y a juste quelques mois, le gouvernement jurait sur tous les saints que la hausse des tarifs de l’énergie se limitait aux plus riches. ‘’Je veux attirer l’attention des populations : il n’a jamais été question d’augmenter le prix du carburant, c’est le gasoil qui est utilisé en majorité dans ce pays et son prix n’a pas bougé’’, soutenait Sophie Gladima. Aujourd’hui, les faits sont tout autres.
Il s’ajoute que si jamais un accord est trouvé entre le gouvernement et Aftu, le retard sur le paiement des subventions peuvent rapidement remettre en cause la mesure. Le gouvernement doit près de 500 milliards aux sociétés de distributions des hydrocarbures. Il est peu probable que les transporteurs aient le même esprit de patience (ou le même matelas financier) que les pétroliers.
Par ailleurs, même si tout cela marche bien – et on le souhaite fort – il restera le secteur informel. Les Cars rapides et Ndiaga Ndiaye occupent toujours une place importante dans le transport urbain, sans oublier les clandos. A Dakar, certains clandos sont déjà passés à l’acte. A Bignona, une course à bord d’un clando passe de 500 à 1000 F, soit le double. Comment s’y prendre avec les taximen ? A qui faut-il verser la subvention, lorsqu’il s’agit du transport interurbain où une personne peut être propriétaire de son véhicule, sans aucune affiliation ?
Qui va payer l’électricité ?
L’histoire nous a montré que tout ce beau monde est toujours resté hors du contrôle de l’Etat. Ces acteurs pourront donc, comme toujours, procéder à l’augmentation des tarifs, selon leur convenance. Certains ont déjà commencé. Et la grève de ce mardi va montrer une nouvelle fois combien ce secteur est complexe.
Ainsi, les riches roulant à bord de leurs véhicules, 4×4 le plus souvent, ces hausses sur le transport s’adressent directement aux pauvres. Habitués à ces situations, ils paieront les tarifs qui leur seront imposés, sans discuter. L’argent du gouvernement ira ainsi à un petit groupe, sans un impact réel auprès du Sénégalais démuni.
Et après le transport, il faudra faire face à tous ceux qui seront affectés par les nouveaux prix de l’électricité, les boulangers en premier. Mais il n’y a pas qu’eux, car il y a les artisans, notamment menuisiers, tailleurs, coiffeurs… Même les petites unités de transformation pourraient s’inviter dans la danse Et parfois, à défaut d’agir sur les prix, certains sont tentés de se rattrapés sur la quantité ou la qualité de service.