Participation à un rassemblement illicite et mise en danger de la vie du commandant du corps urbain : les quatre militaires invalides condamnés
Les quatre militaires invalides qui ont été arrêtés le mercredi 8 juin dernier lors de leur manifestation ont comparu, hier, à la barre des flagrants délits de Dakar. Prévenus de participation à un rassemblement illicite et de mise en danger de la vie d’autrui, Doudou Sy, Ousseynou Fall, El Hadji Mamadou Nago Gueye et Abdou Achim Diouf ont finalement écopé d’une peine d’un mois assortie du sursis.
Alors qu’ils revendiquaient une augmentation de leur pension de retraite, quatre militaires invalides se sont retrouvés derrière les barreaux. Ils ont été arrêtés au cours de leur manifestation organisée le 8 juin dernier. En effet, leur rencontre a vite dégénéré car, il s’en est suivi des affrontements qui les ont opposés aux forces de l’ordre. Durant leur altercation avec les policiers, les anciens soldats ont malmené le commandant du corps urbain, Pape Diène.
Pis, une bouteille de 10 litres contenant de l’essence a été jetée dans sa direction. N’eut été son réflexe d’esquiver le projectile, le pire aurait pu se produire. Car en effet, non loin de la bouteille qui contenait le liquide inflammable, il y avait déjà des pneus en flammes.
Placés sous mandat de dépôt depuis quelques jours, Doudou Sy, Ousseynou Fall, El Hadji Mamadou Nago Gueye et Abdou Achim Diouf, puisque c’est d’eux qu’il s’agit, ont répondu des chefs de participation à un rassemblement illicite et mise en danger de la vie d’autrui. Entendu en premier, Doudou Sy conteste les faits et renseigne qu’il n’est qu’un simple membre du bureau et qu’il ignorait que leur manifestation n’était pas autorisée.
«On avait jeté les pneus en feu vers les policiers pour les disperser afin que nous puissions sortir et manifester. On a interpellé nos camarades avant même qu’on ne commence notre point de presse», a-t-il soutenu. Alors qu’à l’enquête, il avait déclaré qu’ils avaient manifesté et allumé des pneus pour avoir de la visibilité et aviser la presse.
Ousseynou Fall : «le commandant de la police était en tenue lorsque je lui assénais un coup de poing»
Désigné comme étant celui qui a porté un coup au commandant de la police, Ousseynou Fall affirme n’avoir fait que riposter. D’après lui, c’est le policier qui lui a porté un coup sur le menton. «Il était en tenue lorsque je lui assénais un coup de poing. Je reconnais l’avoir frappé», a-t-il dit avant d’être rappelé à l’ordre par la juge.
«Vous pouvez vous faire entendre sans dégâts. Vous pouvez vous faire entendre dans la légalité. Je ne peux pas comprendre des anciens militaires qui violent la loi. Vous avez enfreint la loi», leur dit la juge. «C’est après que les forces de l’ordre nous ont interdit de sortir en nous encadrant, que nous avons allumé les pneus que nous avons jetés dehors vers les policiers. Et je faisais partie de ceux qui tenaient la manifestation», s’est-il confessé avant de jurer qu’il ignore qui d’eux détenait la bouteille d’essence.
Après avoir contesté être celui qui a jeté la bouteille d’essence au commandant, El Hadji Nago Gueye est revenu sur ses déclarations en avouant son délit. Toutefois, il précise que le commandant n’était pas visé. «Après le point de presse, on a manifesté dans le siège de notre association», a martelé Abdou Achim Diouf, ancien militaire, poursuivi pour les mêmes chefs que ses prédécesseurs.
Entendu à titre de témoin, Oumar Dioum renseigne : «j’étais dans le siège où la manifestation s’est tenue. Je suis un ancien militaire. Et je faisais partie de la manifestation. Pour résumer, c’est le commandant qui a frappé en premier Ousseynou Fall. À 8 heures, quand je suis arrivé, j’ai trouvé les policiers sur place. Mais, je n’étais pas là quand Nago allumait le pneu. C’est moi qui ai filmé la scène en direct».
Le maître des poursuites : «j’aurais compris que des citoyens lambda soient dans cette situation. Mais, ce sont des citoyens avertis, ils ont été sous les couleurs du drapeau»
Le représentant du ministère public qui ne cautionne pas l’attitude des anciens militaires a requis 1 mois d’emprisonnement ferme contre eux. «Certes ils ont le droit de manifester puisque c’est un droit accordé à tout citoyen, mais, il faut rappeler qu’il doit y avoir une autorisation. Celle-ci doit se faire 3 jours avant. Ce qu’ils n’ont pas fait. J’aurais compris que des citoyens lambda soient dans cette situation. Mais, ce sont des citoyens avertis, ils ont été sous les couleurs du drapeau. Pourquoi ils s’adonnent à de tels actes sans autorisation, cela est inadmissible dans ce pays. Autre chose à ne pas encourager c’est qu’ils ont été encadrés par des forces de l’ordre et eux qui étaient sous les couleurs de drapeaux, ils devaient négocier et non leur jeter des pneus», a regretté le maître des poursuites.
Espérant plus de compréhension du tribunal à l’endroit des prévenus, Me Assane Dioma Ndiaye a sollicité une application bienveillante de la loi afin qu’ils puissent aller prendre des soins. «Ce n’est pas la première fois. On a vécu d’autres manifestations où finalement les policiers et les militaires invalides ont fini par se faire des accolades. Je rechigne un peu sur la méthodologie du procureur. C’est vrai qu’il faut défendre la République, les institutions et personne ne peut aller à l’encontre de ses principes», a plaidé la robe noire.
Après les avoir relaxés du délit de participation à une manifestation non autorisée, le tribunal a reconnu les prévenus coupables des autres chefs. Ils ont écopé d’une peine de 1 mois assortie du sursis.